Jour J bis + 5

Lorsque Sherkan disait qu’« il en faut peu pour être heureux », on n’était pas encore certains d’adhérer totalement à cet adage. On pensait que pour se faire plaisir, il fallait souvent avoir les bourses bien remplies. Pourtant, on a découvert que non, vraiment, on vous l’assure, Rémi y tient (il m’a d’ailleurs demandé de citer son frère qui dit souvent que le coffre-fort ne suivra pas le corbillard, ce qui est tout à fait vrai), l’argent ne fait pas le moine : on va vous illustrer ça dans l’article qui suit.

Pour nous rendre à la pompe à essence où nous souhaitions démarrer notre stop, on avait déjà été pris par un bon gars qui nous avait repérés depuis le centre-ville, et fait demi-tour pour nous conduire à la station-service. Là-bas, pendant que l’un prépare le panneau d’indication, l’autre en profite pour épuiser dans des milkshakes le reste de ses couronnes tchèques, qui ne nous seront plus d’aucune utilité si nous quittons Prague.

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Tout vient à point qui sait tendre le pouce. Après avoir essuyé de nombreux refus, Léo, un jeune allemand qui sortait du Mcdo’, s’arrête et nous demande où nous souhaitons nous rendre : « À Bratislava, nondidju ! » – « Sehr gut ! Ca tombe bien, je vais jusque Vienne, mais Bratislava est sur le chemin une fois ! ». Une nouvelle perspective s’offre à nous : encore un changement de plan dans notre voyage improvisé ? On pèse vite fait le contre et le pour, et comme un tiens vaut mieux que deux tu l’auras, on décide finalement d’accompagner Léo jusqu’à Vienne pour un voyage d’une quatrecentaine de kilomètres, et une conversation de trois heures trente. Léo a 25 ans et étudie le violoncelle au conservatoire ; il joue pour un orchestre à Berlin et passe son temps à voyager au gré de ses concerts. Né à Hambourg, il est maintenant étudiant depuis 5 ans à Vienne. Il nous raconte comment les habitants y sont trop calmes et austères selon lui. A priori, cette ville ne nous fait ni feu ni flammes. Pourtant, on le remarquera très vite, il ne faut jamais vendre la peau du bœuf avant de l’avoir volé : la capitale autrichienne nous réservera bien des surprises.

Léo nous avoue que c’est la première fois qu’il prend des autostoppeurs dans sa voiture. « Pourquoi piloter seul quand on peut rouler à plusieurs ? » – nous a-t-il dit (on vous le jure, cette fois-ci, on n’invente rien). Une fois de plus, on a affaire à un de ces gaillards sorti de nulle part et qui vous rappelle pourquoi vous vous êtes lancés dans une telle expédition. Il s’excuse de ne pouvoir nous héberger dans son appartement, trop petit, et dans un élan de charité, tente d’appeler une amie susceptible d’avoir assez de place pour accueillir nos matelas. Malheureusement, l’appel reste sans réponse : on se débrouillera autrement, on a appris à se retrousser les coudes depuis le début de notre voyage ! Le voyage en voiture continue, et les conversations vont bon train.

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On rigole, on rigole, mais ça sent le propanol ! Rémi panique : une des recharges de gaz que l’on avait emportées dans nos sacs pour alimenter notre réchaud a sans doute dû se mettre à fuir sous la chaleur ambiante. Il faut s’arrêter in extremis sur le bord de l’autoroute pour vider la réserve de propane : le coma et la mort guettent l’homme qui s’expose à une inhalation prolongée ! Heureusement, plus de mal que de peine : on redémarre avec un petit mal de crâne, mais avec une anecdote cocasse à raconter, et on arrive très vite à Vienne.

Nous sommes tous deux d’avis que de toutes les villes parcourues lors notre voyage, Vienne fut sans doute la plus époustouflante. Chaque coin de rue –toujours d’une propreté impeccable- offre aux yeux du badaud un nouvel édifice somptueux, redoublant toujours plus de prouesse architecturale. Creuset incontournable de la culture européenne du XXe siècle, Vienne vit déambuler dans ses quartiers des hommes d’une renommée internationale : Haydn, Mozart, Freud, Beethoven, Schubert, Klimt, Schonberg, etc. sont autant de personnalités qui firent la fierté de cette capitale. Devant la Hofsbourg, on reçoit un appel : c’est Léa, l’amie de Léo, qui nous invite à passer la soirée avec elle et ses amis puis à dormir dans son salon (tout confort, poêle à bois et parquet en chêne). On se rejoint alors dans un parc, où l’on tient des discussions passionnées en mangeant des bratwurst et en buvant du vin blanc coupé à l’eau pétillante (ça ne paie pas de mine, mais ça se boit assez bien et ça te permet de rester hydraté tout au long de la soirée).

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On se réveille le lendemain matin avec des souvenirs plein la tête et prêts à retourner sur nos pas pour découvrir la ville de Bratislava, capitale de la Slovaquie…